30/06/2004
depuis quelques jours,
un curieux fil se déroule sur une liste de discussion quasi-clandestine...
reproduction ici du début.
pour la suite, rendez-vous sur GFIV Airlines
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From: "gfiv_band"
Date: Tue May 18, 2004 7:11 am
Subject: acceuil clients
ici jane
(voix d'hotesse veloutée)
qui vous souhaite une merveilleuse journée à bord du GFIV plane
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From: "captain pat"
Date: Sat Jun 5, 2004 9:12 am
Subject: le feuilleton du GFIV
"Jan Kurse. Lui ici ? Je l'avais reconnu, malgré son déguisement
ridicule, pensa le commandant de bord en parcourant la fiche de
renseignement que venait de lui tendre l'hôtesse.
Il avait sursauté lorsque, jetant un œil machinal sur l'écran de
contrôle, il l'avait identifié parmi les nouveaux passagers : l'agent secret qui se la raconte, reconnaissable à son rictus de VRP putride.
Bien qu'impassible en apparence, Captain Pat laissa trahir une
certaine nervosité en écrasant d'un violent coup de poing son gobelet rempli à ras bord de vodka citron.
Jane regarda les gouttes de liquide visqueux répandues sur les
cadrans, les voyants lumineux du tableau de bord. Elle comprit que le danger venait de s'engouffrer dans ce qui n'avait été jusque là qu'une paisible croisière.
« De qui s'agit-il ? Vous le connaissez ? », demanda Jane.
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From: "Jan Kurse"
Date: Mon Jun 7, 2004 4:14 pm
Subject: Re: le feuilleton du GFIV
Les sièges de ce taquot sont presque aussi moux que le personnel
d'accueil" pensa Kurse en saisissant négligement sa mignonette de
whisky tout juste achetée au duty (plus vraiment) free de
l'aéroport.
Il l'avala d'une traite et fit un tour d'horizon.
De toute évidence, l'habitacle ne rayonnait pas du plus grand luxe
et la clientelle semblait avoir été triée sur le volet de la misère.
Près des issus de secours, vieille habitude bien ridicule à 10 000
mètres au dessus du sol, Kurse reconnut quelques repris de justice
notoires gromelant et jetant des regards apeurés dès qu'un
retardataire montait dans l'avion.
Ailleurs, les passagers se composaient exclusivement de couples
désoeuvrés en partance pour d'improbables et sinistres
anniversaires de mariage ou de Dieu sait quoi, de poètes sans le sou fuyant leurs ardoises accumulées dans les bistrots poisseux de la capitale et autres faciès du même standing, portant haut leurs destins brisés et bien bas leurs prétentions.
Chacun suivait avec attention les instructions de l'hôtesse avec
ferveur, si bien qu'on aurait cru qu'ils écoutaient là la marche
à suivre pour assurer le salut de leurs âmes, opération qui leur
resterait pourtant à jamais impossible...
Quelques mètres devant Kurse, invisible derrière la porte
blindée certifiée "anti-détournement teroriste", l'équipage
s'affairait pour le décollage, et avec lui, le Capitaine Pat.
Kurse savait qu'il aurait l'occasion de lui toucher deux mots, et
c'était d'ailleurs pour cette raison qu'il était monté dans
l'appareil, sans même jeter un oeil à la destination, mais
avant ça, il fallait le laisser mijoter, attendre bien sagement que l'avion soit en l'air, le pilote automatique enclenché, et ensuite passer à l'action. D'après http://www.weather.com, la météo serait clémente. L'équipage aurait donc du temps à lui consacrer.
Kurse jeta sa mignonette dans le sac à vômi devant lui et boucla sa ceinture.
Déjà l'appareil se présentait en bout de piste, laissant passer un
Boeing 737 qui devait probablement emporter vers une destination
exotique quelques quadras dépressifs souhaitant remplacer leur pauvre aliénation quotidienne par une autre, plus coûteuse de préférence.
Kurse sortit de sa poche une vieille photo cornée.
- A nous deux, Pat, pensa-t-il tout haut.
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From: "captain pat"
Date: Mon Jun 7, 2004 11:57 pm
Subject:
"Sacré Kurse, il n'a pas changé.", dit Captain Pat.
"Je vais lui rappeler les bonnes manières. Ce déchet humain doit
apprendre à se comporter correctement lorsqu'il voyage à bord d'un
ligne de style comme celle du GFIV. "
"Vous voulez que j'envoie un message ?" demanda Jane.
"Non, je vais le faire moi-même."
"Vous n'êtes pas autorisés à interpeller le commandant de bord ou à proférer des menaces ! "
Le voix de Captain Pat résonna, nasillarde, dans les hauts parleurs.
Les passagers se retournèrent. Le message s'adressait manifestement à l'homme pris de boisson qui éructait au fond de l'appareil, au bout d'une travée désertée. Il est vrai que l'odeur de mauvais wisky alliée à un subtil mélange d'odeurs corporelles avaient suffit à libérer l'ensemble des sièges alentour.
"Je t'aurais, hurlait l'homme à l'haleine chargée en direction de la cabine. MONTRE TOI, PAT! "
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From: "captain pat"
Date: Tue Jun 8, 2004 4:47 pm
Subject: LE FEUILLETON
"Vous avez vu, lâcha Captain Pat.
On ne l'entend plus, le baroudeur du ouaibe, le grand flibustier des listes et des forums."
"Je connais ce genre de type et j'en ai souvent transporté. A mon
avis, il va cuver son alcool frelaté en provenance de l'Est (payé le prix fort, persuadé de faire une affaire)."
"Vous voulez dire... jusqu'à... l'arrivée ?", demanda Jane avec une
nuance d'inquiétude qui souleva sa poitrine de manière perceptible.
"Si seulement je savais la destination et le lieu d'arrivée de ce
foutu vol...", pensa silencieusement Pat, le regard perdu loin, très loin, dans le Bleu Klein International de la stratosphère.
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From: "Jan Kurse"
Date: Wed Jun 9, 2004 1:04 am
Subject: Re: LE FEUILLETON
L'hôtesse s'approcha de Kurse et lui tapota sur l'épaule, persuadée
que le bougre était déjà plongé dans le profond sommeil de l'ivrogne.
- Excusez-moi, monsieur. Vous vous sentez bien ?
Kurse sursauta et ôta ses oreillettes.
- Pardon, répondit-il. J'étais en train d'écouter les .mp3 des cours de Deleuze à St Denis. Vous disiez ?
Confuse, l'hôtesse toussota et disparut derrière un rideau à
l'effigie de GFIV Airlines.
"Vraiment aucune éducation, pensa Kurse. A moins que ce ne soit Pat
qui me teste..."
C'était bien dans les coutûmes du GFIV que de tâter ainsi le terrain avant d'engager vraiment les hostilités. Il y avait déjà eu cet étrange message diffusé quelques minutes plus tôt, et maintenant l'hôtesse. Désormais, c'était certain, Pat savait que Kurse était à bord. Mais à moins de provoquer un amérissage d'urgence, il allait devoir composer avec cet encombrant passager, car quelques milliers de pieds sous eux, l'océan s'étendait à perte de vue.
Kurse fit un rapide calcul mental, et prenant en compte l'heure, la
vitesse approximative de l'appareil et quelques coordonnées
géographiques, il estima que la côte égyptienne devait être à environ 1 heure de vol.
Si vraiment Pat tenait à le débarquer, il tenterait de se poser au
Caire. Mais en attendant...
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From: "captain pat"
Date: Wed Jun 9, 2004 7:57 pm
Subject: Re: un autre feuilleton !
"Que se passe-t-il encore ? demanda Captain Pat, l'air maussade."
"C'est quoi ce bordel ?"
"Il s'est réveillé...", répondu Jane.
"Et... Il réclame un autre feuilleton."
"Putain, en plus c'est le genre d'emmerdeur qui va nous ramener le
plateau repas et se plaindre de la musique."
"Cela m'étonnerait, soupira Jane. Il écoute Deleuze dans son
baladeur."
Captain Pat tira brusquement sur les manattes.
"Putain, DELEUZE !" lacha-t-il dans le fracas des réacteurs.
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From: "captain pat"
Date: Mon Jun 14, 2004 11:53 pm
Subject: LE FEUILLETON
Jane souleva le rideau qui séparait la cabine de la partie réservée
aux passagers. Ceux-ci étaient assoupis.
Les haut parleurs diffusaient une musique étrange et douce.
Mais un bruit caractéristique venait rompre cette paisible torpeur.
Kurt, ronflait bruyamment.
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From: "captain pat"
Date: Wed Jun 16, 2004 11:29 pm
Subject: escale
La température extérieure est de 37°.
Ce qui est plutôt frais pour la saison.
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From: "SilenciA"
Date: Mon Jun 28, 2004 7:59 am
Subject: Re: le feuilleton du GFIV
SilenciA s'était embarquée sous une fausse identité et un faux
visage sur ce vol.
Elle avait de vieux comptes perso à régler avec Kurse le bien nommé,
et, par la boucle rétroactive du destin, une multinationale des
nanotechnologies la payait justement pour çà,
ou + Xactement pour prélever un bout du fessier de K. afin de mener
des découvertes insolites dont elle ignorait tout et dont elle se
fichait bien.
Sa seule préoccupation du moment était : comment accéder au popotin
de Kurse sans qu'il s'en rende compte ?
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From: SilenciA
Date: Tue Jun 29, 2004 3:57 pm
Subject: Opération reversO
Silencia se souvint soudain Q, + jeunes, Elle & Kurse adoraient suçoter ensemble des bonbons à la menthe poivrée.
Elle se remémora avec une certaine mélancolie les papiers bleu argenté qu'ils aimaient tant dérouler et détacher délicatement du bonbon,
avant de le faire bruisser et tournoyer entre leurs doigts maladroits...
Mais l'heure n'était + aux jeux tendres et insouciants de l'enfance.
Elle devait faire la peau du cul à Kurse /
en tout k lui en dérober subrepticement un morceau,
d'un coup sec et ample du poignet,
avec son mini-sé-K-teur.
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From: "jan kurse"
Date: Wed Jun 30, 2004 10:36 am
Subject: Re: [gfiv_band] Opération reversO
Ca commençait à bien faire.
Alors qu'il n'avait même pas dégoissé un mot, tout ce foutu appareil tremblotait déjà d'anxiété rien qu'à l'idée de voir un gus comme Kurse à bord.
Le briscard se dit qu'il ne pensait pas avoir une telle renommée. En tout cas, une chose était sûre : sa couverture était grillée et bien grillée.
Maintenant, inutile de se voiler la face, il fallait y aller franco de port.
Il enroula méthodiquement le fil de ses écouteurs dans lesquels la voix de Deleuze disait "l'idée du plaisir, c'est une idée complètement pourrie", rangea le tout dans son sac "Sous le soleil" et appuya sur le bouton d'appel de l'hôtesse.
L'appareil avait décollé depuis plusieurs minutes et devait maintenant planer à plus de 6000 mètres.
Qu'est-ce qu'ils allaient faire ? Le jeter par dessus bord ?
Aucune chance.
En particulier parce que le Capitaine connaissait très bien Kurse. Il savait qu'il pouvait le tuer, le faire disparaître, mais qu'il ne fallait surtout pas louper son coup, car Kurse était comme la poisse : il revenait toujours.
29/06/2004
il est tellement facile de se laisser flatter
le sens du poil fait du bien
mais c'est le compliment qui nous empêche de voir la ruine de nous-mêmes
oublions ce crétin de Lafontaine
& cette ahuri cul-béni de Pascal
Silvana dit que la flatterie n'a de sens
qu'en temps qu'inventaire des objectifs militaires détruits
chaque approbation comme une médaille
donnée par le général
non pas parce que c'est exceptionnel
mais parce qu'on a normalement fait
ce qu'on nous a dit de faire
16/06/2004
je m'étais soudain assagi
Silvana ne le disait pas ouvertement, mais je crois que ça lui plaisait
j'avais pris l'habitude de me laver les dents tous les soirs et tous les matins
j'avais fait le ménage dans mon bureau et depuis quelques semaines, je ne jetais plus la nourriture un peu partout (le reste de la maison, Silvana préfère s'en occuper)
je m'étais mis à dormir dans la chambre au lieu de m'écrouler là où je me trouvais quand le sommeil me prenait (le rituel des dents aide à trouver la force d'aller dans la chambre)
bref, j'étais relativement normal
et la vie des gens normaux est très chiante, si bien que je ne m'étonne plus de les voir toujours pressés
avec toute cette somme de trucs chiants à faire à longueur de journée
ce soir je vais aller au bistrot
parce que c'est dans ces moments où l'on n'a plus du tout d'argent
qu'il faut le dépenser en alcool.
13/06/2004
nous nous posons souvent la question de savoir s'il vaut mieux faire du mal aux autres ou bien en faire à soi-même
qu'est-ce qui est le plus utile à l'amélioration de la situation ?
08/06/2004
dans la gamelle du chat
qui moisissait depuis des semaines
des mouches ont pondu
leurs oeufs
et des larves ont commencé à naître
sans que personne ne s'en aperçoive
au moment de la nettoyer
je suis tombé nez à nez
avec une centaine de vers
grouillant
les uns contre les autres
entrelacés & aveugles
c'était une vision si passionnante
que j'ai décidé de ne pas prendre de photo
car je voulais conserver
en plus de l'image
la sensation que j'ai eu
d'être ce dieu de la gamelle du chat
observant l'immonde ballet gluant
d'une société en train de s'entre-dévorer
puante
car cela puait
chaque larve à moins d'un centimètre
du bord de la gamelle
mais incapable de sortir
condamnée à rester contre ses congénères
et ramper
éternellement
03/06/2004
ceux qui nous connaissent (parenthèse sur le fait que nous n'avons pas les stats de ce blog, ni de notre site, et qu'il est plus que probable que l'un et l'autre ne soient lus que par nous même, ce qui était d'ailleurs le but) ne s'étonneront pas de notre fébrile excitation en attendant d'aller voir ce soir même un nouveau film de destruction globale.
il y a trop peu de films de destruction globale.
le 11 septembre 2001 n'a d'ailleurs rien arrangé à cet état de fait.
la paranoïa de chacun est devenue intérieure, cérébrale, alors qu'elle devrait s'exprimer dans le fracas de tôle sémantique violement froissée par Hollywood, le théâtre, la musique et la littérature vindicative.
quand diable l'artiste brisera-t-il enfin ce qui le sépare de la furie animale, des projections de morts violentes les plus sordides et de l'extinction radicale de toute pensée en ce monde ?
avec Silvana, nous allons ce soir nous assoir devant l'extinction de l'espèce humaine, car même si les studios nous réservent un happy end quelconque, dans nos cortex ne subsisteront que le spectre noir de notre mort prochaine et le soulagement infini d'avoir pu y assister en direct.
pas de sang, pas de cris.
juste la fin, définitive et irreversible.
